La bombe nucléaire américaine explose aussi son budget avec presque 1 000 milliards de dollars d'ici 2034.
Sous les ors du Capitole, une bombe à retardement silencieuse grossit dans les lignes budgétaires. Le 24 avril 2025, un rapport de l'Office budgétaire du Congrès (CBO) a dévoilé un chiffre qui fait froid dans le dos : 946 milliards de dollars seront engloutis dans l'arsenal nucléaire américain entre 2025 et 2034, soit l'équivalent de 32,4% des 2 921 milliards d'euros du PIB français en 2024. Une progression de 25 % par rapport aux projections précédentes. Une hausse historique, dans un contexte où la course aux armements reprend de plus belle entre grandes puissances.
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Un bond spectaculaire du coût nucléaire américain anticipé d'ici 2034
En 2023, la même étude tablait sur 756 milliards de dollars. En deux ans, la facture a explosé de 190 milliards supplémentaires, sous l'effet combiné :
- Des dépassements de coûts du programme Sentinel (nouveaux missiles balistiques intercontinentaux)
- De l'extension de la période d'étude jusqu'en 2034
- De l'inflation dans les projets d'infrastructure et de modernisation
Selon le rapport, les dépenses nucléaires représenteront en moyenne 95 milliards de dollars par an sur la prochaine décennie.
Voici la ventilation de ces coûts monumentaux :
| Poste | Montant prévu (en milliards de dollars) |
|---|---|
| Maintien et exploitation des forces existantes | 357 |
| Modernisation des systèmes de livraison et des ogives | 309 |
| Modernisation des laboratoires et des installations | 72 |
| Commandement, contrôle et communications (C3) | 79 |
| Prévision de dépassements de coûts | 129 |
Un poids de plus en plus lourd dans le budget de la Défense
La part du nucléaire dans les dépenses militaires ne cesse de grimper. Entre 2025 et 2034, elle devrait atteindre 8,4 % des budgets de défense, contre seulement 3,9 % en 2014.
Le pic est attendu en 2031, où 13,2 % de l'ensemble des acquisitions militaires seront consacrées à l'atome militaire, avant un léger reflux à 10,7 % en 2034.
Or, cette croissance menace de perturber les ambitions de Donald Trump, qui veut porter les dépenses militaires américaines au-delà du trillion de dollars annuel d'ici 2026. Chaque milliard englouti dans le nucléaire, c'est un milliard de moins pour d'autres programmes stratégiques ou conventionnels.
Le programme Sentinel : l'accélérateur de la dérive
Parmi les responsables de cette flambée, le Sentinel ICBM Program occupe une place particulière. Ce projet de remplacement des missiles Minuteman III connaît un dépassement de 81 % par rapport aux coûts initialement prévus.
Le nouveau missile, censé assurer la dissuasion nucléaire jusqu'en 2075, représente aujourd'hui un gouffre budgétaire mal maîtrisé. Et encore, le rapport du CBO n'intègre pas totalement les dernières estimations alarmantes du Pentagone.
Une pression stratégique sur Trump
Bien que Donald Trump pousse pour un renforcement massif de l'armée, il s'est montré réservé sur l'extension des armes nucléaires. Des voix proches de son entourage plaident pour relancer des discussions stratégiques avec Pékin et Moscou, afin d'éviter un nouvel emballement incontrôlé.
Car en plus du coût financier, c'est la crédibilité de la dissuasion américaine qui est en jeu. Si le rythme de modernisation devient insoutenable, c'est toute la cohérence de l'arsenal qui pourrait être remise en question dans les décennies à venir.
Où va chaque dollar de ce budget nucléaire ?
Le rapport détaille la répartition prévue des 946 milliards :
| Catégorie | Montant prévu (en milliards de dollars) |
|---|---|
| Missiles stratégiques et sous-marins nucléaires | 454 |
| Armes nucléaires tactiques (F-35, missiles SLCM-N) | 15 |
| Laboratoires nucléaires et sites de production | 193 |
| Commandement, contrôle, communication et détection précoce | 154 |
La moitié du budget sera absorbée par les sous-marins nucléaires et leurs missiles balistiques embarqués.
Un débat nucléaire qui s'intensifie
Si les partisans de la modernisation insistent sur la nécessité d'adapter l'arsenal à un monde multipolaire — face à la Russie, la Chine, et des menaces émergentes — les critiques dénoncent une dérive incontrôlée.
Dans les cercles stratégiques américains, une question revient de plus en plus souvent :
- Moderniser, oui, mais jusqu'où ?
- À quel prix pour la sécurité intérieure, les infrastructures civiles, ou la santé publique ?
Car chaque milliard injecté dans les armes nucléaires est un milliard en moins pour des programmes sociaux, scientifiques ou environnementaux.
À l'heure où la compétition mondiale s'intensifie, l'Amérique semble avoir fait son choix : elle investira massivement dans sa capacité de destruction. Mais à quel prix politique, économique et moral ?
Source : https://www.defense.gov/Multimedia/Experience/Americas-Nuclear-Triad/
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