
Le retour en force du charbon en Chine : un pas en arrière pour le climat ?
En 2024, la Chine a démarré la construction de centrales à charbon pour une capacité estimée à 94,5 gigawatts, un chiffre sans précédent depuis 2015 ! Ce rebond marque une rupture avec les engagements précédents de Pékin, qui visait à un « contrôle strict » de l’utilisation du charbon durant la période 2021-2025. Cette escalade, déclenchée par les craintes de pénuries énergétiques dès 2023, semble contrecarrer les efforts, pourtant réels du pays pour réduire sa dépendance aux énergies fossiles.
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La Chine fait feu de tout bois et oscille entre charbon et énergies renouvelables pour son expansion économique sans limite
D’après un rapport conjoint du Centre de Recherche sur l’Énergie et l’Air Propre (CREA) et du Global Energy Monitor (GEM), malgré une augmentation record de la capacité en énergies renouvelables l’année passée, l’intégration de cette énergie propre au réseau électrique chinois ainsi que sa disponibilité intermittente resterait un véritable « casse-tête chinois » qui n’aurait pas encore trouvé de réponse satisfaisante… Du moins assez pour se passer de charbon.
Les vieux démons du charbon
La Chine, plus grand consommateur de charbon et plus gros émetteur de gaz à effet de serre, a pourtant éliminé plus de 100 gigawatts de capacités obsolètes au cours de la dernière décennie. Les nouvelles constructions sont théoriquement autorisées uniquement pour servir de soutien aux bases d’énergies renouvelables. Cependant, la compétition pour une place sur le réseau électrique est féroce, avec des taux d’utilisation qui ont fortement chuté vers la fin de l’année dernière.
Un virage énergétique sous pression
Le pays a mis en service 357 gigawatts de capacités éoliennes et solaires ((277 GW solaires et 80 GW d’éolien) l’année passée, atteignant son objectif de 1 200 gigawatts prévu pour 2030 avec six ans d’avance. Néanmoins, le charbon reste une partie importante du mix énergétique chinois, et son maintien risque de compliquer la réduction rapide des émissions.
Des enjeux mondiaux
La persistance du charbon dans le système énergétique chinois pourrait non seulement freiner les ambitions climatiques nationales mais aussi poser des défis significatifs aux efforts climatiques mondiaux. Qi Qin, chercheuse principale au CREA, souligne que si le charbon conserve une part élevée trop longtemps, il sera beaucoup plus difficile d’atteindre une baisse rapide des émissions. Ce phénomène intervient alors que les nations sont censées renforcer leurs objectifs pour 2035.
Ecologie versus intérêts industriels chinois
La pression actuelle pour le développement du charbon est principalement motivée par les intérêts industriels, qui avancent sous la bannière de la sécurité énergétique. Ces groupes tiennent compte dans leurs calculs des contraintes imposées par les objectifs de pic de carbone en 2030 et de neutralité carbone en 2060 et cherchent à sécuriser leur croissance avant que la fenêtre d’opportunité ne se referme.
Comparaison avec l’Europe
La trajectoire énergétique de l’Europe et de la Chine présente des contrastes frappants en 2024. L’Europe atteint un jalon historique avec le solaire dépassant le charbon dans sa production électrique, représentant 11,1% du mix contre 9,8% pour le charbon. Les énergies renouvelables atteignent 47,4% du mix électrique européen, tandis que les combustibles fossiles chutent à 28,9%. En revanche, la Chine, bien qu’ayant installé 277 GW de nouvelles capacités solaires et 80 GW d’éolien en 2024, continue de dépendre fortement du charbon. Malgré ses progrès impressionnants dans les énergies renouvelables, la Chine reste le plus grand émetteur mondial de gaz à effet de serre, représentant 32,3% des émissions mondiales de CO2 en 2023.
Ce tournant paradoxal dans la politique énergétique chinoise révèle les tensions entre la croissance économique à court terme et les engagements environnementaux à long terme. La Chine se trouve à la croisée des chemins, devant concilier développement industriel et impératifs climatiques dans un contexte de pressions internes et externes croissantes.
Source : https://www.taipeitimes.com/News/world/archives/2025/02/14/2003831880
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