Publication: 30/08/2018
Corsair vient d’annoncer la suspension de sur l’axe Dakar-Paris-Dakar, à partir de février prochain. Derrière cette éviction attendue, l’ombre d’Air Sénégal et son influent directeur, Philippe Bohn.
Ce n’est pas la première fois que des rumeurs sur le départ de la compagnie circulent dans les médias africains. L’Observateur du Sénégal avait déjà, par le passé, évoqué le départ de Corsair. Cette fois, ce sera la bonne (même si le média africain, légèrement fâché avec les dates, a prédit le départ de Corsair six mois avant l’heure). Dans un communiqué paru cette semaine, le transporteur, filiale de TUI, confirme la cessation de ses droits à partir du 31 janvier 2019.
Une décision précipitée qui sent bon la manœuvre d’influence…
Un départ attendu
À la décharge de Philippe Bohn, l’ex-Monsieur Afrique d’Airbus reconverti directeur général d’Air Sénégal SA, le départ de Corsair International était prévu de longue date. Depuis que le président Macky Sall, à la poursuite d’un rêve aérien que d’aucuns estiment trop ambitieux, avait déclaré la lancée d’Air Sénégal, le temps était compté pour Corsair. La compagnie disposait depuis 2012, à titre dérogatoire, des droits de trafic sénégalais pour rallier Orly à Dakar sept fois par semaine en Boeing 747.
L’arrivée d’Air Sénégal a bouleversé cet équilibre subtil : vu que le Sénégal disposait désormais d’une compagnie porte-drapeau, il semblait naturel qu’elle se réapproprie ces droits.
Mais la précipitation dont fait preuve la toute jeune compagnie nationale en a surpris plus d’un et la notification de fin de droits de Corsair, communiqué par l’ANACIM (l’équivalent de la DGAC française), semble porter le sceau de la précipitation. Car la situation d’Air Sénégal est en effet tout sauf reluisante. Confrontée aux avaries d’un de ses deux seuls avions, la compagnie peine déjà à assurer les fréquences qu’elle occupe sur la ligne régionale Dakar-Ziguinchor. Peut-elle dès lors assumer le grand saut vers le long courrier ? D’aucuns critiquent du bout des lèvres l’idée de ce pari risqué. « Une telle desserte ne se prépare par en six mois : ce n’est pas tout d’avoir des avions, il faut aussi les remplir, prévoir une politique commerciale… Et il faut avoir les moyens de cette politique ! » siffle, sous l’anonymat, un ancien de Sénégal Airlines à Jeune Afrique.
Cette décision hâtive a d’ailleurs surprise jusqu’à la première concernée. La compagnie Corsair, qui regrette de ne pas avoir pu « bénéficier d’une période de transition de quelques mois », déplore également les éventuels dommages à « la clientèle des deux compagnies ».
Le risque : qu’Air Sénégal défaille, et qu’on assiste à un retour au monopole d’Air France sur la ligne, avec des conséquences financières désastreuses pour les passagers.
Coup de sang ou coup de comm ?
Au-delà des péripéties opérationnelles, Air Sénégal – ou plus exactement sa direction – connait d’autres problèmes… d’image.
Depuis plusieurs mois, la direction est plus que critiquée dans la presse sénégalaise pour ses choix stratégiques et le coût financier de ses actions. Philippe Bohn est régulièrement taxé d’être le chantre de la Françafrique pour ses liens avec Airbus. Sa décision d’acquérir rubis sur l’ongle deux avions de l’entreprise n’a rien arrangé. À cela s’ajoute son salaire, jugé excessif, qui s’élèverait à trois fois celui de son prédécesseur selon ses opposants.
Mais la goutte d’eau a été dépassée avec le recrutement de Jérôme Maillet, ancien d’Air France Consulting et ex-numéro 1 de Congo Airways. L’homme est justement recherché en RDC pour des malversations qui auraient, selon des sources congolaises, abouti à un mandat d’arrêt à l’encontre de Maillet. Le directeur adjoint, qui aurait quitté le Congo en catimini, n’a jamais démenti ces affirmations.
Toujours est-il que la succession d’attaques médiatiques, que d’aucuns attribuent aux anciens de Sénégal Airlines, a porté. Bohn comme Maillet ont fini par endosser l’image, un brin distordu, d’icônes de la Françafrique. La direction d’Air Sénégal SA, soucieuse de redorer son blason nationaliste, aurait-elle poussée au départ de Corsair ?
Pour aussi séduisante que soit l’hypothèse, le top management de la compagnie nationale se retrouve désormais coincé. Obligée en six mois d’accomplir ce qu’aucune compagnie africaine avant elle n’a accompli, Air Sénégal SA pourrait bien se brûler les ailes. Limoger l’une des compagnies les plus appréciées du Sénégal n’aura dès lors servi à rien. Et là, nombreux seront les experts à glisser, sourire béat et air fat, « Je vous l’avais bien dit ».
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