Le Venezuela grand gagnant de la crise énergétique ?

Le Venezuela grand gagnant de la crise énergétique ?

Alors que Washington a besoin de davantage de pétrole en raison du conflit ukrainien et de la crise énergétique mondiale, les Etats-Unis pourraient se résoudre à réduire les sanctions frappant de plein fouet le Venezuela. Et cela, en raison de la non reconnaissance par la Maison Blanche du président en place, Nicolas Maduro, qui lui préfère le chef de l’opposition, Juan Guaido.

« Juan Guaido est à la tête d’une opposition fatiguée », confirmait en 2020 Florence Pinot de Villechenon, professeure à l’ESCP et directrice du Cérale, auprès de France 24. Et pour cause, le président vénézuélien, Nicolas Maduro, et le chef de l’opposition et du Parlement, Juan Guaido, en place depuis plus de trois ans, n’arrivent toujours pas à s’entendre sur les futures échéances politiques et économiques à mener au sein du géant-sud-américain.

« J. Guaido a surestimé ses capacités à forcer la fin du régime de Maduro. Le pouvoir actuel tient par le jeu d’intérêts économiques. La garde rapprochée de l’actuel président vénézuélien n’a pas pris ses distances avec (lui)… Car les généraux bénéficient de l’argent du trafic d’or, de drogue et de pétrole que le président leur laisse. Et ils ne semblent pas prêts à y renoncer », précisait ainsi l’intéressée.

Avant d’ajouter que « toutes ses tentatives pour renverser le pouvoir sont restées vaines. Ni les manifestations qu’il a organisées début 2019, ni même son appel aux troupes à se soulever (le 30 avril 2019) n’ont abouti : les casernes n’ont pas bougé. Quant à l’état-major, ce dernier est resté loyal à N. Maduro ».

Dans les faits, le chef de l’opposition s’était auto-proclamé président par intérim du Venezuela au mois de janvier 2019, avec « la bienveillance de l’Oncle Sam ». Mais ce soutien pourrait quelque peu s’étioler en raison du contexte géopolitique international.

Les intérêts américains avant tout

Et pour cause, interrogé par RFI, Christophe Ventura, directeur de recherche à l’IRIS, confirme que la crise ukrainienne pourrait amener les USA à reconsidérer l’embargo frappant durement Caracas. Et donc de facto à renouer leurs liens diplomatiques avec N. Maduro, le rival de Guaido.

Ce n’était pas du tout anticipé et anticipable, mais l’un des impacts du conflit russo-ukrainien sur le plan géopolitique est que les États-Unis essaient, de façon très pragmatique, de colmater les brèches de leurs importations de pétrole « en rouvrant le robinet » du Venezuela. Historiquement, toute l’industrie pétrolière du Venezuela est arrimée aux chaînes de production et de valeur pétrolières américaines. Pour ce faire, il faudrait des investissements massifs dans les infrastructures vénézuéliennes, après des années de crise et de détérioration liées à la situation économique et aux sanctions imposées par Washington. Les Américains peuvent peut-être mettre ces investissements dans la balance. Cela permet en tout cas à Nicolas Maduro de jouer une séquence diplomatique et stratégique à son avantage.

Maduro fustige l’ingérence américaine

De son côté, le clan Maduro – soutenu par la Russie, la Chine, l’Iran, la Turquie et Cuba – reproche toujours à Washington de vouloir placer « son poulain », Juan Guaido, à la tête de l’Etat. Une « machination » qui s’apparente à une stratégie de hard power en bonne et due forme en provenance de la Maison Blanche. En atteste, la décision de Washington de geler l’ensemble des avoirs du gouvernement vénézuélien aux Etats-Unis.

« Nous dénonçons l’embargo économique des Américains, les attaques, l’appel à la conspiration et au coup d’Etat”, martelait ainsi en août 2019 l’ex-ministre des Affaires étrangères, Jorge Arreaza, auprès de la presse internationale. Pire, Juan Guaido sollicitait et soutenait ce blocus économique, fustigeait l’intéressé.

Une situation nationale plus que précaire

Pour rappel, Caracas – qui dispose des plus grandes réserves d’or noir au monde – traverse malheureusement un marasme social particulièrement alarmant. Depuis 2015, plus de quatre millions de Vénézuéliens ont en effet quitté le pays en raison de la pénurie de denrées alimentaires, d’énergie et de soin frappant en plein coeur le territoire.

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