
Il aura fallu une longue enquête – et des engagements concrets du groupe Bolloré – pour que la commission européenne lève les freins à l’OPA de Vivendi sur Lagardère. Hachette entre donc officiellement dans le giron du groupe du milliardaire breton, l’opération créant une recomposition du secteur de l’édition.
Le récent feu vert donné par la Commission européenne à l’offre publique d’achat (OPA) de Vivendi sur Lagardère marque la fin d’un long feuilleton. Contrôlé par la famille Bolloré, le groupe spécialisé dans les médias et la communication (Canal+, Havas, Prisma Media…) peut officiellement s’emparer de celui d’Arnaud Lagardère, propriétaire notamment d’Europe 1, de RFM, de Paris Match, du Journal du dimanche (JDD) ainsi que du numéro un français de l’édition, Hachette.
Des « mesures correctives substantielles »
L’histoire a débuté en février 2020. Avec 57,35 % du capital, Vivendi devient l’actionnaire majoritaire de l’ancien fleuron de l’industrie française, fragilisé par la pandémie de Covid-19 et dont le patron, lourdement endetté, est poursuivi par le fonds activiste Amber. En 2022, Vivendi profite de sa situation pour lancer une OPA afin de prendre le contrôle total du groupe Lagardère. Mais il lui fallait l’accord de Bruxelles pour pouvoir exercer tous les pouvoirs que lui confère ce statut.
Or, les autorités européennes craignaient que l’opération de fusion entre Editis, filiale de Vivendi, et Hachette, nuise à la concurrence dans le secteur de l’édition et des magazines de presse. Ils ont finalement soumis leur autorisation à des « mesures correctives substantielles ». Pour se plier à leurs exigences, Vivendi s’est donc engagé à céder le « people » Gala ainsi que ses activités dans l’édition, à savoir Editis et ses différentes entités comme Robert Laffont, Nathan, Le Robert et Pocket.
Selon Vivendi, la cession d’Editis devrait ainsi être effective d’ici la fin d’octobre. Une promesse de vente à International Media Invest (IMI) du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, actionnaire du Monde, de Marianne et de la FNAC, a été signée, le 23 avril. Le magazine Gala quant à lui, sacrifié au profit du plus prestigieux Paris Match, ferait l’objet d’une dizaine de marques d’intérêt. L’exécutif européen a donc jugé que ces engagements « répondent intégralement aux problèmes de concurrence relevés par la Commission ».
Bolloré : un recentrage sur les médias et l’édition
Pour les Bolloré, la conquête de Lagardère est une étape clé dans le recentrage des affaires familiales sur les médias et l’édition. L’actuel patron de Vivendi, Yannick Bolloré, estime qu’une fois ces opérations digérées, le groupe pèsera 16 milliards d’euros de chiffre d’affaires (contre 10 aujourd’hui) et passera de 38 000 à plus de 65 000 collaborateurs.
L’internationalisation de ses activités devrait également être renforcée, essentiellement grâce à Hachette qui détient notamment les maisons d’éditions Grasset, Fayard, Stock ou Calmann-Lévy. Mais Videndi s’intéresse toujours de près à Simon & Schuster, un groupe éditorial américain dont la vente à Penguin Random House, filiale du géant mondial de l’édition, l’allemand Bertelsmann, a été refusée en justice.
Reste à connaître l’avenir de la filiale « Travel Retail » de Lagardère. Cinquième opérateur mondial du commerce en zone de transport et numéro deux mondial dans les aéroports, Lagardère Travel Retail pèse lourd. Pour l’heure, Vivendi semble hésiter entre le développement de cette nouvelle activité ou la vendre.