Bahreïn ou le fléau « du silence » des opposants politiques

Le Bahreïn ne ménage pas ses efforts pour isoler ses opposants politiques

La dictature sunnite du Bahreïn défie les droits de l’Homme contre vents et marées. Et cela, dans le silence cynique de la communauté internationale.

Comme le souligne Human Rights Watch (HRW), le gouvernement bahreïni utilise ses lois dites d’isolement politique, parmi d’autres tactiques, pour empêcher des activistes et d’anciens membres de partis d’opposition d’accéder aux fonctions publiques et de prendre part à d’autres aspects de la vie publique.

Dans les faits, un récent rapport relayé par l’ONG documente l’utilisation de ces lois adoptées en 2018 par ce petit pays du golfe Persique pour empêcher les opposants politiques de se présenter aux élections parlementaires ou même de siéger au conseil d’administration d’organisations civiques.

HRW a constaté que la marginalisation ciblée par le gouvernement des figures de l’opposition de la vie sociale, politique, civile et économique a entraîné une série d’autres violations des droits humains. Les personnalités, Hajer Mansoor et Nabil Rajab, sont ainsi des exemples majeurs de cette vaste purge.

Hajer Mansoor

Hajer Mansoor, une prisonnière d’opinion, a purgé une peine de trois ans d’emprisonnement à l’issue d’un procès manifestement inique. La malheureuse n’a finalement obtenu sa libération que début mars 2020, relaie Amnesty International. Une hérésie pure et simple pour Lynn Maalouf, directrice des recherches de l’ONG sur le Moyen-Orient :

Hajer a été condamnée à trois ans d’emprisonnement pour des accusations absurdes de terrorisme; Uniquement en raison de ses liens familiaux avec Sayed Ahmed Alwadaei, un militant des droits humains qui réside aujourd’hui au Royaume-Uni. Sa parodie de procès n’était donc qu’un acte de représailles visant à intimider. Mais aussi à faire taire un détracteur du Bahreïn qui leur avait échappé. Il n’est pas rare que, pour réduire au silence des militants vivant à l’étranger, les autorités harcèlent, menacent et détiennent arbitrairement des membres de leur famille. Tous les autres prisonniers d’opinion détenus uniquement pour avoir exercé sans violence leurs droits fondamentaux ou en raison de leurs liens avec des personnes ayant critiqué les autorités doivent à présent être libérés immédiatement et sans condition. 

Nabil Rajab

Le cas H. Mansoor n’est pas sans rappeler la jurisprudence Nabil Rajab; Un dissident opposé à la guerre au Yémen où le Bahreïn occupe une place au côté de son allié saoudien. Une prise de position du militant chiite qui lui a valu une véritable descente aux enfers. Déjà condamné à deux ans d’emprisonnement en juillet 2017 pour « propagation de rumeurs et de fausses nouvelles lors d’interviews télévisées hostiles au pouvoir », l’intéressé avait alors vu sa condamnation à cinq ans de prison dans une autre affaire définitivement entérinée par la Cour suprême.

Concrètement, ce coup de poignard judiciaire portait sur des tweets de Rajab dénonçant des cas présumés de torture à Bahreïn. Il lui était en outre reproché « d’avoir accusé un pays voisin », à savoir l’Arabie saoudite qui mène actuellement une lutte d’influence meurtrière contre l’Iran au Yémen. Sans surprise, ce jugement portait le sceau de la solidarité diplomatique.

Un traitement de faveur en prison

Rajab a donc subi un triste calvaire dans les geôles du pays jusqu’à sa libération en juin 2020. Selon l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT), l’Etat interférait en effet dans le traitement médical suivi par l’opposant… Dont la santé lui a valu plusieurs séjours à l’hôpital. Sa vie ne tenait d’ailleurs qu’à un fil, fustige la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH).

Qui ajoute que Rajab – intimement lié au Printemps arabe par ses actions contestataires – n’était qu’un exemple de plus de la répression en règle sur le territoire consistant à « emprisonner, torturer, intimider, déchoir de leur nationalité ou forcer à l’exil de nombreuses personnes s’étant opposées pacifiquement ou ayant critiqué la politique étatique ».

Pour rappel, Bahreïn mène régulièrement des actions discriminatoires à l’encontre de la communauté chiite établie dans le royaume. Rajab a notamment milité à plusieurs reprises pour que cette dernière bénéficie d’une meilleure représentation au Parlement.

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