Taïwan : « la dissuasion par l’US Navy » n’impressionnerait plus la Chine selon un rapport américain

Un think tank américain affirme que l’armée US, encore supérieure technologiquement, n’est plus suffisamment puissante pour dissuader Pékin d’envahir Taïwan. En cause notamment, la flotte de guerre chinoise, la plus importante au monde en nombre de navires de guerre.

En aout dernier, la visite à Taïwan de Nancy Pelosi, la présidente de la chambre des Représentants, troisième plus haut personnage de l’État américain, a été vécue comme une provocation par la Chine qui avait immédiatement réagit en organisant ses plus grandes manœuvres militaires jamais effectuées autour de l’ile de la discorde.

Un épisode de plus dans l’histoire mouvementée des exécrables relations sino-américaines qui se sont encore un peu plus tendues depuis l’élection de Joe Biden à la Maison blanche. Le président américain a ainsi plusieurs fois indiqué de façon explicite que l’armée américaine apporterait son aide à Taipei en cas de guerre avec la Chine. Suffisant pour faire reculer Pékin ?

Une stratégie de « dissuasion par l’US Navy » plus adaptée

Rien n’est moins sûr si l’on en croit le rapport publié par la Brookings Institution. Selon ce prestigieux think tank américain, les Etats-Unis ont en effet « perdu leur suprématie militaire conventionnelle sur la Chine ». Concrètement, les auteurs de ce long rapport mettent en doute la capacité de l’armée américaine à intimider Pékin, une stratégie dite de « dissuasion par l’US Navy » longtemps payante dans le Pacifique.

En cause, les progrès réalisés par l’armée de la République populaire laquelle possèderait aujourd’hui la plus grosse flotte militaire du monde en nombre de navire de guerre. En 2020, un rapport du Pentagone soulignait que la marine chinoise disposait d’une force de combat de 350 navires, contre 293 pour l’US Navy. Il tirait surtout la sonnette d’alarme sur la vitesse avec laquelle elle ne cesse de s’accroitre, la production des bâtiments de guerre chinois atteignant un rythme que le monde n’avait plus connu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Entre 2019 et 2020, Pékin a ainsi construit et mis en service pas moins de 5 nouveaux navires contre un seul pour les Américains. La flotte chinoise pourrait compter jusqu’à 420 bâtiments d’ici 2025 et 460 d’ici 2030. De son côté, l’US Navy pourrait atteindre une capacité de 355 navires d’ici 2035.

Des simulations guère rassurantes pour Washington

Pour autant, les navires américains possèdent toujours un avantage qualitatif sur la plupart de ceux de leurs rivaux. La flotte américaine compte par ailleurs 11 porte-avions à propulsion nucléaire – contre bientôt trois pour la Chine – et encore trois fois plus de bâtiments de surface majeurs, type destroyers et croiseurs. Cependant, l’avantage technologique se réduit notent les experts de la Brookings Institution. Le gouvernement de Xi Jinping continue de moderniser sa flotte, construit davantage de navires amphibiens et de porte-avions pour accroître sa puissance globale, et investit massivement dans les missiles, le renseignement, les communications et la cyberguerre. D’autre part, le déséquilibre quantitatif pourrait atteindre de telles proportions qu’il existe un vrai risque de submersion en cas de conflit.

Ainsi, les simulations de combat menées par l’US Navy et l’US Air Force n’invitent guère à l’optimisme côté américain. Selon un autre rapport du Pentagone, publié cette fois en 2021, Les Etats-Unis aurait toutes les peines du monde à repousser une attaque chinoise sur Taïwan. Pire, Washington risquerait de voir ses bases du Pacifique attaquées avant même d’avoir pu intervenir.

Reste la dissuasion nucléaire. Si les experts estiment que la Chine disposera de 700 ogives nucléaires d’ici 2027 et d’au moins 1000 d’ici 2030, contre 3 750 pour les Etats-Unis, Washington ne pourra probablement pas suivre longtemps le rythme de Pékin en matière de production de noyaux de plutonium. Conclusion de la Brookings Institution : « Une course aux armements nucléaires contre la première puissance manufacturière du monde semble être un exercice futile ». Seul moyen de continuer à tenir en respect le puissant rival asiatique selon les experts : la menace économique. C’est en effet celle qui dissuade sans doute le plus Pékin sur le dossier taïwanais.

Articles en relation