La dette extérieure africaine plombée par les créanciers privés occidentaux

La dette extérieure africaine plombée par les créanciers privés occidentaux

Halte aux idées reçues ! Selon l’ONG Debt Justice, les créanciers privés occidentaux détiennent trois fois plus de dette africaine que la Chine avec des taux d’intérêts deux fois supérieurs à ceux appliqués par Pékin.

Une étude publiée par Debt Justice, une ONG britannique qui milite pour la fin de la dette dans les pays en développement, bat en brèche certains préjugés tenaces sur l’Afrique. Elle met notamment à mal l’idée selon laquelle la Chine utiliserait systématiquement « le piège de la dette » pour exercer une influence contrainte sur ses partenaires africains, voire pour les  obliger à céder leurs actifs stratégiques lorsqu’ils ne peuvent plus rembourser.

Selon les auteurs de cette étude intitulée « La crise croissante de la dette dans les pays à faible revenu et les réductions des dépenses publiques », Pékin est, certes, le premier créancier bilatéral du continent mais la majeure partie de la dette des pays africains est détenue par des créanciers européens et américains, principalement des banques, des gestionnaires d’actifs et des négociants en ressources primaires.

Trois fois plus de créances que la Chine

Concrètement, cette dernière représente 35% de la dette extérieure du continent, estimée à 696 milliards de dollars par la Banque mondiale. C’est trois fois plus que la créance de la Chine à l’égard des pays africains (12% seulement de la dette extérieure de l’Afrique). En outre, les taux d’intérêt exigés par ces prêteurs occidentaux privés sont deux fois supérieurs à ceux réclamés par Pékin (5% contre 2,7% en moyenne) ce qui pénalise les finances publiques africaines.

Ainsi, sur les vingt-deux pays africains les plus endettés, douze versent aux prêteurs occidentaux plus de 30 % du total des paiements de leur dette extérieure (Cap-Vert, Tchad, Égypte, Gabon, Ghana, Malawi, Maroc, Rwanda, Sénégal, Soudan du Sud, Tunisie et Zambie) et seulement six dans ces proportions aux prêteurs chinois (Angola, Cameroun, République du Congo, Djibouti, Éthiopie et Zambie).

Le poids de la crise de la dette

Autre idée battue en brèche : alors que la part du service de la dette africaine à verser aux acteurs privés européens et américains à l’horizon 2028 s’élève à 35%, contre 19% pour la Chine, la participations des occidentaux aux initiatives d’allègement de la dette s’avère extrêmement faible. Ainsi, lors de la pandémie de Covid-19, les prêteurs privés européens et américains n’ont suspendu que de 0,2% leurs créances à l’égard des pays africains, contrairement aux recommandations exprimées par le G20 dans son programme dit « Cadre commun ». En cause, l’absence d’un mécanisme contraignant les prêteurs privés à prendre en charge une part plus significative dans l’allègement de la dette hors de leurs frontières.

Ce qui n’a pas empêché les dirigeants occidentaux de blâmer la Chine pour son rôle supposé dans la crise de la dette en Afrique. Selon un des analystes de Debt Justice, « la vérité est que leurs propres banques, gestionnaires d’actifs et négociants en pétrole sont beaucoup plus responsables. La Chine a participé au programme de suspension de la dette du G20 pendant la pandémie, contrairement aux prêteurs privés. Il ne peut y avoir de solution efficace à l’endettement sans l’implication des prêteurs privés ». Et de pointer du doigt la responsabilité du Royaume-Uni et des États-Unis qui se sont bien garder d’introduire une législation adéquate alors même que la plupart des contrats internationaux de dette privée sont conclus en vertu du droit britannique ou américain.

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